CHAPITRE 2
Martin V s'en va-t-en guerre
Apocalypse 18:8
A cause de cela, en un même jour, ses fléaux arriveront, la mort, le deuil et la famine, et elle sera consumée par le feu. Car il est puissant, le Seigneur Dieu qui l'a jugée.
Chassé quelques semaines de Rome, le Saint-Père se rendit compte que sa Mission, pour divine et célestissime qu'elle fut, ne pouvait être remplie sans un minimum de coopération des habitants locaux. Martin V s'interrogea : était-il prêt à vaincre les réticences de son peuple? Etait-il bien celui par qui le triomphe de la Voie Divine arriverait? Serait-il capable de convertir les incroyants, de convaincre les hérétiques, de brûler les apostats? A ces questions, au bout de quelques minute, le Saint-Père trouva une réponse simple, claire et non dénuée d'une dose d'arrogance :
OUI!
Il reprit son armure et marcha à la tête de ses armées vers Rome insurgée. Au bout de quelques semaines de siège, ayant brouillé les émissions de la Rai et de Mediaset, les romains, abrutis par l'absence du Calcio sur leurs écrans, le laissèrent rentrer.
Rome était reprise!!!
Pour mieux gouverner la ville et ses Etats, Martin V convoqua son Conseil et fit part de ses mûres réflexions:
"Je le reconnais, j'ai été trop mou! Les romains ont cru impunément me mettre en danger. Eh bien je vais les gouverner moi. A la dure. Moïse ou Abraham étaient des vrais méchants. Moi ça va être pareil. Ah ça s'agite, ça s'amuse, ça ne fout rien! Je vais me te les soigner aux petits oignons tous ces margoulins moi!"
Sa première décision fut de
rétablir les impôts que les romains, par égard envers eux-mêmes, ne payaient plus guère depuis quelques décennies.
Sa surprise fut grande lorsque:
"Rhaaaa mais c'est pas vrai!!! Ils vont pas me les briser comme ça longtemps!"
Le Pape remit son armure, reprit la tête de ses armées, balança quelques brigands au bout de cordes, et reprit ses possessions quelques semaines plus tard. En rentrant dans son beau château Saint-Ange, il prit conscience de la nudité des murs et du vide des placards.
"Les petits sagouins!" soupira Martin
"Ils ont tout piqué dans mes armoires! Même mon album Panini "Martyrs et Saints de l'Eglise Chrétienne!" Ah non ça va pas se passer comme ça. Faut pas déconner". Furieux contre l'impolitesse des ladres du latium, Notre Saint-Père convoqua le prévôt de la ville, Babassino pour lui expliquer sa façon de penser.
"Messire Babassino, j'exige que les romains me restituent mes effets personnels! Je trouve particulièrement malpoli cette habitude de dérober tout ce qui passe sous les yeux de ces voyous! Je veux que soit placardé un avis dans tout Rome!
-Notre Très Saint-Père, je...
-Suffit! Cet avis signalera que tous les romains seront tenus de rembourser les effets perdus par le Très Saint Père! Et au triple de leur valeur!
-Ils n'accepteront jama...
-Ils vont la boucler et m'obéir! Allez, je vais être grand et miséricordieux : si quelqu'un se dénonce, je suspendrai cette punition collective!"
Le bon peuple romain accepta avec philosophie cette décision de son Souverain...
EH MEEEEEERDE!!!
Re-armure rutilante. Re-marche forcée à travers le centre de l'Italie. Re-siège. Re-prise de la ville. Le Pape fit brûler quelques maisons sur son passage, de colère.
"On peut vraiment rien tirer d'eux! " conclut l'infortuné Pontife. Décidé à ne pas laisser ces misérables gueux lui pourrir l'existence, le Pape ruminait sa vengeance.
"Néron a bien maté ces fourbes. S'ils continuent de me les briser, je fous le feu à leur maudite ville et je vais installer ma capitale à Ajaccio! Au moins les corses, eux, se font sauter entre eux!"
Célébrant sa première messe dans la Cathédrale de Rome, Martin V monta en chaire, bien décidé à faire passer le message.
"Mes bien chers frères, mes bien chères soeurs, la Providence Divine m'envoie auprès de vous, peuple fier et ombrageux, afin de rétablir la Parole de Notre Très Haut. Je l'admet, je vous ai mal jugés depuis que je suis arrivé ici. Je comprend qu'après une si longue période sans Berger et sans Lumière Divine, vous vous trouviez désarçonnés par cette situation. J'ai donc décidé de Vous accorder mon Pardon. Seulement comme le disait Ezéchiel, "Le Saint-Album Panini au Saint-Père tu rendras". Donc je vous préviens : si celui qui me l'a piqué ne se dénonce pas, je fais flamber la ville comme Néron et je vous fais griller tous comme les rats que vous êtes!"
Devinez quoi...
SCROGNEUGNEUGNEUGNEU!!!
Armure. Marche. Siège. Prise de la ville.
"J'ai l'impression qu'on s'amuse à mes dépens ici... Ok, je ne dis plus rien, je me vengerai: rira bien la vengeance qui se mange froide en dernier!"
Sur ces entrefaites arriva une bien étrange nouvelle. Les napolitains, alliés de Notre Sainte Mère l'Eglise fricotaient avec l'Aragon et ne respectaient pas les prérogatives papales. Les détails de toute cette histoire n'intéressaient pas le Souverain Pontife. On allait enfin avoir une guerre : de quoi occuper les misérables romains qui ne cessaient de se révolter. Convaincu qu'aux plus grands maux entraînés par l'oisiveté et la désobéissance, la guerre est le meilleur remède, le Pape déclara tout de go la guerre à Naples. Le soutien du riche roi de Provence, Louis III d'Anjou laissait penser que l'affaire serait vite réglée.
Et elle le fut. Au terme d'une campagne éclair, les généraux napolitains furent vaincus. Sa Sainteté était particulièrement heureuse de ce dénouement.
"Ah ça on dira ce qu'on veut, mais une bonne guerre, ça leur a bien appris les bonnes manières au petit peuple romain! Naples et l'Apulie sont à moi. A MOI!!! AH AHAHAHAHAHAHAHAH!
Seulement, le Grand Martin V, Conquérant de l'Impossible, Mitre d'Acier, Soutane d'Or, Le Pape, Saint-Pierre réssucité, le Papissime, le Célesto-papissime, le Célestissime Pape, la Céleste Majesté des Âmes et tous autres surnoms ridicules qu'il imagina un instant dans son esprit fut fort marri lorsque le général Sylla l'informa d'une petite contrariété juridique pas forcément grave, mais assez emmerdante dans l'instant... La scène se déroula devant Naples, le Pape se rendant dans ses nouveaux Etats pour les annexer. Assis sur son cheval, il approchait des murailles de la ville, quand survint le Général Sylla.
"Votre Impériale Célestissimo-Saintitude?
-Oui mon Grand Sylla, qu'as tu à m'apprendre? ah!! Quelle Joie. Naples est-elle annexée? Je ne sais contenir ma Divine Joie. Le Seigneur m'a Récompensé de mes épreuves... Je viens de recevoir des télégrammes d'un peu partout : France, Aragon, Angleterre, Bavière, Autriche, et même un d'Ethiopie. Je ne les ai pas encore ouvert, mais j'attend avec impatience de découvrir les louanges qu'on m'aura adressées....
-Justement, Céleste Sainteté
-Allons Sylla, toi aussi tu peux te réjouir, je veux te voir joyeux. C'est un grand jour! Après tant d'humiliations!
-C'est que
-Bon sang, mais qu'as tu? Pour une fois qu'on peut se réjouir de quelque chose, tu viens faire la gueule à mes côtés. Je me demande ce que...
-Tenez...regardez les drapeaux qui flottent aux murailles"
Sylla tendit au Pape une longue vue... Celui-ci regarda son général avec étonnement puis s'empara de l'objet. Un rapide coup d'oeil et ce fut une ennuyeuse scène pour la Chrétienté...
EH MEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEERDE!
Une mauvaise lecture du contrat d'alliance avec la Provence ainsi qu'une méconnaissance des causes profondes du conflit, qui n'intéressaient guère le Pape, entraîna la signature d'une paix blanche particulièrement minable. En même temps, il fallait le deviner qu'un marseillais avec un nom de dynastie "Anjou" avait des droits sur Naples... Eh pas évident...
Le domaine papal ne s'était pas agrandi. Et les télégrammes n'étaient pas particulièrement avenants...
France: Tu travailles pour le Roi de Provence maintenant? Pape de mes deux, c'est à Avignon que se tient la Papauté...
Angleterre : By Jove! Well Done!
Aragon : Hijo de p***, Napoli esta muy bien por aragon! e non per ridiculos cretinos!
Ethiopie : Bwahahahahahahahahah
Et quand le petit peuple de Rome apprit que son Très Céleste Saint Père avait planté une guerre gagnée par une mauvaise lecture des termes juridiques du contrat, devinez ce qu'il se produisit?
CASSSSSES-BUUUUUUUUUURNES hurla le Pape. Armure. Chevauchée. Prise de Rome. Incendie. Pendaisons. Comme d'hab quoi.
Et vu le bilan brillant dont pouvait se targuer le bonhomme, un malheur n'arrivant jamais seul... Un concile élut un nouvel Anti-pape. Faut dire que les résultats de celui-ci n'étaient pas évidents à défendre.
Comme on dit, avec des défenseurs pareils, la Chrétienté n'a pas besoin d'ennemis...
"Ohé le narrateur, tu te calmes! Je suis quand même le Celesto-Pape!"
Moi je veux bien me calmer, mais devine un peu comment les romains vont réagir quand ils apprendront qu'on a élu un antipape...
AH NON!
Forcément. Si, si. Ballot hein?
Je te crois pas!
Ben si
FOUTU JEU DE [BIP] DE PAPAUTE DE [BIP]! Je vais convertir tout le monde en soldat et hop à l'assaut. Mais où est l'onglet 'Pops'. Jeu de m****
Heureusement pour le Saint-Père, un infortuné imbécile, à Milan, allait lui donner l'opportunité formidable de se racheter...
Prochain épisode : Martin V ne capitule jamais