Originally posted by P. Alavares Cab
en effet sam
je vais discuter avec ma prof dessus histoire d'y voir plus clair.
j'avais jamais vu les choses comme ca
Sam a effectivement - en partie - raison : le texte auquel il fait référence est l'article 2 de la Loi Constitutionnelle du 14 août 1884, qui stipule :
"L'alinéa 3 de l'article 8 de (la même) Loi (constitutionnelle) du 25 février 1875 est complété ainsi qu'il suit : 'La forme républicaine du Gouvernement ne peut faire l'objet d'une proposition de révision. Les membres des familles ayant règné sur la France sont inéligibles à la Présidence de la République' "
Cependant, il est permis de ce demander ce qui constitue une révision de la 'forme républicaine du gouvernement' : le transfert des pleins pouvoirs au Maréchal effectué par l'Acte dit "Loi Constuitutionelle" (LC) du 10 juillet 1940 ? Ou les premiers textes (actes constitutionnels) du Cabinet Pétain établissement l'Etat français ?
Or, la "révision" de 1940 stipule :
"L'Assemblée Nationale donne tout pouvoir au Gouvernement de la REPUBLIQUE, sous l'autorité et la signature du Maréchal Pétain, à l'effet de promulguer un ou plusieurs actes une nouvelle constitution de l'Etat français (..) Elle sera ratifiée par la Nation et appliquée par les assemblées qu'elle aura créees."
Là, ou Sam n'a pas totalement raison, c'est que le texte de 1940, s'il est fort contestable dans ses termes, ne remet absolument pas en cause jurdiquement la forme républicaine (et même démocratique) du Gouvernement : il confie au Cabinet Pétain le soin de rédiger une nouvelle Constitution, qui devra être approuvée par la Nation. Rien de bien choquant : c'est le même type de mandat qui sera donné en 1958 au gouvernement du Général de Gaulle.
Le problème ne vient donc pas de cette notion (républicaine ou non) de l'Etat sensé être mis en place à la suite de la révision de 1940, mais surtout du fait que - contrairement à 1958 - les formes prévues pour la révision n'ont absolument pas été respectées, pas plus que le principe même de révision établi par la Loi constitutionelle de 1875, qui prévoyait expréssement un seul mode de révision, exclusivement parlementaire.
Aussi, non seulement la procédure décrite à l'article 8 des LC de 1875 n'a pas été respectée, mais surtout l'Assemblée Nationale ne pouvait pas se décharger de ses prérogatives de révision sur le gouvernement.
On peut donc dire que si la LC du 1O juillet 1940 ne portait PAS attente juridiquement à la forme républicaine du gouvernement, sa nullité au regard de la LC de 1875 est avérée, ce qui revient à dire que le pouvoir du Maréchal Pétain était juridiquement illégitime.
Mais...
...faisons-nous un instant l'avocat du diable et passons outre le strict cadre juridique des LC de 1875, en reconnaissant que les débris de l'Assemblée Nationale représentaient
de facto le peu de légitimité politique existant encore dans la France exsangue et défaite de l'été 1940... Admettons un instant que celle-ci ait donc - légitimement - transmis son pouvoir constituant au Cabinet Pétain...
...s'offre alors à nous un second problème de taille : les actes fondateurs de l'Etat français n'ont jamais été soumis à l'approbation de la Nation... les règles décrites dans la "LC" du 10 juillet 1940 (déjà frappée
de jure de nullité) n'ont donc jamais été respectées...
... rendant
de facto illégitime le transfert de pouvoir effectué à l'automne 1940 en faveur de la nouvelle construction juridique nommée "Etat français", ceci en l'absence d'une ratification par la Nation des actes constitutionnels le créant, au mépris de la LC sur laquelle reposait ses fondements "juridiques".
Ce régime étant au surplus a-démocratique et trouvant ses fondements dans une mystique anti-républicaine, on peut également revenir à la thèse développée par Maurice Duverger et reprise par Sam (mais, à mon sens, seulement à l'automne 1940, et non directement lors du vote de juillet...)
Ainsi,
de jure comme
de facto, la légitimité n'était pas à Vichy. Etait-elle pour autant à Londres ? Ne s'est-elle pas autodissoute, sur la route menant de Bordeaux à Vichy, dans une torpeur estivale accablante à laquelle s'ajoutaient les coups de boutoir de l'ennemi ?
Celle-ci disparue, l'Etat était à prendre et le pouvoir à établir... Dans ces conditions, et en pleine guerre, la conclusion qui s'impose - a posteriori - à notre quête est lapidaire :
"Vae victis !" (*)
(*) NB: J'en veux pour preuve que la nullité de la prétendue LC du 10 juillet 1940, certes incontestable sur le plan juridique, a été expréssement constatée par l'article 3 de l'ordonnance du GPRF... datée du 9 août 1944 (seulement 1944 !!!), relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire métropolitain.